Vers une recalibration de l’EU ETS :
Par Matthieu Jalard et Emilie Alberola
A la suite de la validation des objectifs énergie-climat de 2030 par le Conseil de l’UE en octobre 2014, la proposition de révision de la directive de l’EU ETS divulguée en juillet et l’adoption définitive de la réserve de stabilité du marché (MSR) en septembre 2015, les grandes lignes d’un EU ETS recalibré émergent pour la période 2020 -2030. Alors que le débat sur la révision précise de la Ddrective s’ouvre en 2016, la question se pose quant à la capacité de cet EU ETS « peau neuve » à fournir un signal prix suffisamment clair et prédictible, qui puisse stimuler les investissements bas carbone et l’innovation, au-delà d’un simple impact sur les décisions opérationnelles de court terme.
A partir de notre analyse détaillée, trois principales leçons émergent de la mise œuvre du Paquet énergie-climat 2020 entre 2008 et 2014, et sont à considérer pour la préparation de la phase IV de l’EU ETS.
- L’objectif de réduction des émissions assigné au périmètre de l’EU ETS a déjà été atteint en 2014, mais le signal prix carbone semble avoir joué un rôle marginal.
- Dans ce contexte, la rigidité de l’offre dans l’EU ETS a donné lieu à un important surplus atteignant 2,1 milliards de quotas en 2014.
- Associé à un manque de confiance envers l’EU ETS de la part des acteurs, le surplus de quotas a conduit à une chute des prix du CO2.
À l’avenir, une decarbonisation efficace des secteurs couverts par l’EU ETS nécessite des niveaux de prix du CO2 reflétant les coûts des technologies bas-carbone sur le long terme. De plus, étant donné les incertitudes et les obstacles pour mobiliser tout le potentiel de réduction des émissions, des mécanismes complémentaires demeureront clés pour stimuler les investissements à faible intensité de carbone. Ces instruments complémentaires devront être toutefois coordonnés avec l’EU ETS.
L’introduction de la MSR permettra d’absorber le surplus dans une large mesure, et de renforcer la resilience du mécansime aux chocs exogènes découlant des conditions éconmiques et des politiques complémentaires. Cependant, sans une gouvernance appropriée de la MSR, et plus largement de l’EU ETS, les incertitudes concernant le développement à long terme du prix du carbone resteront trop élevées pour stimuler les investissements nécessaires. Des mécanismes de support seront d’autant plus nécessaires pour appuyer les investissements bas-carbone, et s’ils émergent de manière fragmentée comme c’est le cas pour le moment, le coût de la décarbonisation pourrait ainsi augmenter fortement pour les citoyens européens.