Édition 2023 du Panorama des financements climat
Dans son Panorama des financements climat, I4CE dresse l’état des lieux annuel des investissements réalisés par les ménages, les entreprises et les pouvoirs publics, dans la rénovation des logements, les achats de véhicules électriques, les énergies renouvelables, ou encore les infrastructures ferroviaires, cyclables et de transports en commun urbains.
Les investissements climat atteignent 100 milliards d’euros mais restent insuffisants au regard des besoins
Les investissements climat des ménages, des entreprises et des administrations publiques atteignent 100 milliards d’euros en 2022. Par rapport à 2021, ils progressent surtout dans les véhicules électriques, la production d’électricité renouvelable, les réseaux électriques ou encore la rénovation énergétique des logements. Ils sont stables dans les infrastructures ferroviaires et le nucléaire. D’après les premières données disponibles, les investissements climat termineraient l’année 2023 en hausse, tirés notamment par les véhicules électriques.
Mais il faudra investir nettement plus pour réduire sensiblement les émissions de gaz à effet de serre. Le scénario provisoire de la stratégie nationale bas‑carbone donne un premier repère des besoins. Chaque année entre 2024 et 2030, il faudra investir en faveur du climat 58 milliards d’euros de plus qu’en 2022. Les besoins se concentrent dans la rénovation énergétique des bâtiments, les véhicules électriques et le réseau ferroviaire. À l’horizon 2030 et dans les mêmes secteurs, ces besoins sont proches de ceux identifiés par Jean Pisani-Ferry et Selma Mahfouz, dans un rapport paru en mai dernier.
Les pouvoirs publics financent un tiers des investissements climat
Si la majorité des investissements climat sont réalisés par les ménages et les entreprises, les pouvoirs publics financent un tiers des dépenses en 2022. Cette part moyenne des financements publics varie beaucoup selon le secteur, de seulement 17 % pour les véhicules bas‑carbone et les énergies renouvelables jusqu’à 92 % pour les infrastructures de transport. Elle correspond à des financements inscrits dans les budgets de l’État et des collectivités, mais aussi aux prêts et aux participations des banques publiques, ou encore aux ressources des bailleurs sociaux et des gestionnaires d’infrastructure. En outre, au-delà de la part chiffrée ici, l’État participe au capital de plusieurs entreprises comme EDF ou la SNCF, et régule les investissements dans les réseaux électriques et gaziers.
Avec le plan de relance adopté fin 2020, les dépenses de l’État en faveur du climat ont augmenté dans les secteurs étudiés en 2021 et en 2022, avant de diminuer nettement en 2023. Une grande partie de cette baisse est sans incidence sur les nouveaux investissements climat. Il s’agit du recul des charges de service public de l’énergie, qui s’explique par les prix élevés du gaz et de l’électricité sur les marchés de gros en 2022. Toutefois, les dépenses en faveur des infrastructures de report modal, de la rénovation et de l’acquisition des véhicules électriques sont globalement stables en 2023, alors que les prix de ces équipements en hausse. Le projet de loi de finances pour 2024, présenté cet automne, prévoit une hausse des dépenses sur le périmètre plus large de la planification écologique.
Zoom sur les principales tendances de quatre secteurs clés
Les investissements dans la rénovation énergétique des bâtiments augmentent pour atteindre 22 milliards d’euros en 2022, mais la part des rénovations globales demeure faible. Les aides à la rénovation des ménages et les crédits du plan de relance pour les bâtiments publics ont soutenu les investissements après leur recul pendant la crise sanitaire. Les achats dans l’immobilier ancien, qui constituent une occasion privilégiée pour des rénovations globales, reculent avec la hausse des taux sur les crédits bancaires. Le scénario provisoire de la stratégie nationale bas‑carbone cible davantage de rénovations globales, notamment dans les bâtiments énergivores, ce qui requiert des investissements supplémentaires à hauteur de 28 milliards d’euros en moyenne de 2024 à 2030.
Les investissements dans les véhicules bas‑carbone, en particulier les véhicules électriques, croissent rapidement pour atteindre 16 milliards d’euros en 2022, portés par la dynamique enclenchée avec la réglementation européenne entrée en vigueur en 2020 ainsi que par les aides et la réglementation nationale. L’autonomie prolongée des batteries et la densification du réseau de recharge contribuent à l’augmentation des investissements. Cependant, l’électricité reste peu présente sur le segment des utilitaires et des poids-lourds. Les besoins dans ce secteur sont très importants et l’électrification progressive de tous les segments conduirait à des investissements supplémentaires à hauteur de 27 milliards d’euros de 2024 à 2030.
Les investissements dans les infrastructures de report modal augmentent légèrement en 2022 pour atteindre 12 milliards d’euros. Le déploiement de grands projets, comme le Grand Paris Express ou le Canal Seine Nord Europe, contribue à l’augmentation des investissements. Les besoins d’investissement pour 2024-2030, récemment réévalués par le Conseil d’orientation des infrastructures, s’élèvent à 6,5 milliards d’euros au-delà du niveau de 2022, tandis que les soutiens publics dont bénéfice le secteur reculent légèrement en 2023.
Les investissements dans les énergies renouvelables ont fortement progressé en 2022 pour atteindre 12 milliards d’euros. Un niveau record qui s’explique par le dynamisme des chantiers en cours dans l’éolien en mer, et la progression des installations de panneaux photovoltaïques en autoconsommation. Les investissements dans le gaz et la chaleur renouvelables sont stables, car bien que la hausse du prix du gaz fossile ait rendu ces projets plus rentables, leur coût a fortement augmenté du fait des pénuries de matériaux. Dans ce secteur, les besoins d’investissement sont estimés à 2 milliards d’euros supplémentaires, l’augmentation rapide du rythme des installations étant compensé par la baisse anticipée des coûts des équipements.
Le rapport actuellement en ligne a été modifié par rapport à la version initiale du 15 décembre 2023. Deux graphiques présentant l’évolution des investissements climat dans la rénovation énergétique des bâtiments et les véhicules routiers bas-carbone ont été corrigés p.21. Une autre correction a été apportée au graphique 12 p.29 le 17 janvier 2024. Ces changements ne remettent pas en question les principaux messages du rapport