Les comptes mondiaux du carbone en 2023
Les 4 tendances de 2023
74 Au 1er août 2023, 74 mécanismes de tarification carbone ont été recensés à travers le monde, sous la forme de taxes carbone, ou de systèmes d’échange de quotas d’émissions (SEQE). Ces mécanismes peuvent opérer à des échelles différentes : 31 d’entre eux fonctionnent à l’échelle provinciale, 42 à l’échelle nationale et 1 à l’échelle interétatique (SEQE-UE). Les territoires couverts par des mécanismes de tarification carbone représentent ainsi 54 % du PIB en 2023 et 50 % des émissions mondiales de gaz à effets de serre (GES).
0,01-154 USD L’éventail des prix explicites du carbone reste très large. Au 1er août 2023, ils varient entre 1 centime de dollar en Basse-Californie au Mexique et 154 dollars (USD) en Uruguay par tonne de CO2e. Plus de 70 % des émissions couvertes le sont encore à un prix inférieur à 20 USD/tCO2e. Or, le rapport Stern-Stiglitz de 2017 sur les prix du carbone estime que le plein effet d’incitation de ces mécanismes serait atteint pour des prix entre 40 et
80 USD/tCO2e en 2020 et 50 à 100 USD/tCO2e en 2030.
93 Mds USD Après avoir atteint 97 Mds USD en 2021, les revenus de la tarification carbone se stabilisent en 2022 à 93 Mds USD. Cette relative baisse entre 2021 et 2022 s’explique principalement par l’évolution des taux de change à la même période et la réduction des quotas mis aux enchères. Plus de 50 % des revenus sont fléchés vers des projets
« verts » ou de développement, 10 % sont redistribués directement ou indirectement aux acteurs économiques impactés, quand le reste (32 %) alimente le budget des États sans fléchage particulier (cf. p.10). Bien qu’une hausse du nombre de mécanismes ait eu lieu ces dernières années, les revenus de la tarification proviennent principalement de cinq mécanismes, générant à eux seuls les trois quarts des revenus : les SEQE européen, britannique et allemand (resp. 44 %, 8 % et 7 %) et les taxes carbone française et canadienne (resp. 9 % et 7 %).
24 % Ce chiffre représente la part des émissions couvertes par un mécanisme de tarification carbone. Il inclut les émissions taxées à prix réduit ou couvertes par des quotas gratuits. Si l’on considère uniquement les émissions taxées au prix explicite, ce chiffre tombe à 6.
Zoom sur les derniers développements
Entre 2022 et 2023, de nouveaux mécanismes de tarification ont été mis en place à travers le monde. À l’échelle nationale, l’Indonésie a lancé cette année la première phase de son SEQE, couvrant 99 centrales électriques, soit 80 % des capacités de production du pays. Au Japon, 400 entreprises se sont engagées volontairement dans le nouveau SEQE couvrant 28 % des émissions. L’Australie a réformé les règles de son Safeguard Mechanism, le transformant ainsi en un SEQE de type Baseline and Credits pour couvrir 28 % des émissions nationales. Enfin, la Hongrie a annoncé mettre en place rétroactivement à compter du 1er janvier 2023 une taxe s’appliquant aux entreprises bénéficiant d’une allocation importante de quotas gratuits dans le cadre du SEQE-UE. Celle-ci comporte deux composantes : une tarification carbone de 40€/tCO2e, ainsi que des frais de transaction de 10 % sur la valeur des quotas obtenus gratuitement.
À l’échelle provinciale, au Mexique, les États de Guanajuato et de Durango ont mis en place en 2023 leurs propres taxes environnementales, comprenant un volet sur les émissions de GES. La collecte des droits d’émissions a cependant échoué dans l’État du Tamaulipas. Les difficultés rencontrées par l’État afin de mesurer les émissions des entreprises seraient à l’origine de cet échec. En Basse-Californie, plusieurs recours ont été tranchés par le pouvoir judiciaire mexicain, exonérant les plaignants du paiement de la taxe, sans l’abroger pour autant. Il a été indiqué que seule la Fédération avait la compétence de taxer les produits pétroliers tels que l’essence ou le gasoil. Aux États-Unis, l’État de Washington a lancé son SEQE de type Cap-and-Trade. Le Regional Greenhouse Gas Initiative (RGGI), un SEQE réunissant plusieurs États à l’est des États-Unis, est quant à lui au cœur de l’actualité. Les combats politiques continuent en Pennsylvanie pour savoir si l’État devrait rejoindre ou non le RRGI, tandis que la Virginie progresse dans son projet visant à se retirer de ce même marché. En Caroline du Nord, les derniers votes du Sénat rendent très peu probable l’adhésion de l’État au RGGI. Au Canada, la Nouvelle-Écosse, le Nouveau-Brunswick, l’Île du Prince-Edouard et Terre-Neuve et Labrador ont abandonné leur taxe carbone provinciale au profit de la redevance fédérale tandis que la Nouvelle-Écosse et le Saskatchewan ont fait évoluer leur SEQE respectif pour se conformer aux règles fédérales (cf. p.3).
Impact de la crise énergétique et de la guerre en Ukraine en Europe
Afin de contenir la hausse du prix de l’énergie, certains pays européens ont pris des mesures visant leurs instruments de tarification carbone. Le Portugal, où le taux de la taxe carbone est indexé sur le prix des quotas du SEQE-UE de l’année précédente, a décidé dès janvier 2022 de geler le taux de sa taxe à son taux de 2021. La Slovénie, ayant recours à un instrument fiscal similaire, a triplé le taux de sa taxe carbone entre 2020 et 2022, avant de geler sa collecte du 21 juin 2022 au 9 mai 2023. L’Autriche a repoussé la mise en place de son SEQE de 3 mois lors de l’été 2022. L’Allemagne a gelé la hausse de son mécanisme prévue en 2023 et utilise les revenus de son SEQE pour contenir la hausse des prix de l’énergie (cf. p.11). En Ukraine, le prélèvement de la taxe carbone a continué dans les oblasts non touchés par le conflit, dont les revenus iront en 2024 à un nouveau « Fonds pour la décarbonation et l’efficacité énergétique ».
Carte mondiale des prix explicites du carbone en 2023