Mario Draghi tire la sonnette d’alarme – L’Europe peut-elle agir à temps ?
Au retour des vacances d’été, nous entamons ce nouveau mandat de l’Union européenne avec un sens aigu de l’urgence. Le rapport de Mario Draghi sur la compétitivité européenne a tiré la sonnette d’alarme : la santé économique de l’UE se détériore et c’est maintenant qu’il faut agir pour éviter une « lente agonie ». En effet, l’UE souffre d’une série de maux profonds – des défis que le nouveau collège des commissaires élus devra aborder lors des auditions à venir. La fragmentation du marché unique restreint la croissance, la concurrence internationale affaiblit les industries clés et les efforts de décarbonation sont à la traîne, comme le souligne l’Observatoire européen de la neutralité climatique. Ces problèmes exigent une réponse rapide.
Dans notre dernière étude, nous faisons un état des lieux des nombreux instruments dont l’UE dispose déjà et qu’il faudrait mobiliser rapidement sans hésiter pour éviter les dommages durables qu’on nous prédit. Une politique industrielle verte a le potentiel de répondre aux préoccupations en matière de climat et de compétitivité. Toutefois, des initiatives antérieures, telles que la loi « Net Zero Industry Act » et la plateforme « Technologies stratégiques pour l’Europe », soulèvent des doutes quant à la capacité de l’Union européenne à mener à bien une procédure de cette ampleur. La prochaine étape ? « Le pacte pour l’industrie propre ». Bien que tous les détails ne soient pas encore réglés, il est à craindre que ce plan ne propose que des solutions fragmentaires. Pour réussir, ce plan doit proposer un traitement d’ensemble, et ne pas se contenter d’une série de mesures d’appoint et non coordonnées.
Pour que le pacte pour l’industrie propre soit couronné de succès, l’UE doit se concentrer sur la mise en place d’une gouvernance efficace et de réglementations ciblées. Plutôt que de créer de nouveaux organes, les cadres existants, tels que les dialogues sur l’industrie propre, devraient être élargis. Il faudra aussi renforcer le travail de transparence concernant la mise en œuvre des recommandations. Des outils éprouvés, tels que les alliances industrielles européennes, peuvent permettre d’identifier les goulets d’étranglement et d’orienter les financements là où il y en a le plus besoin. Dans le même temps, l’approfondissement de l’Union des marchés de capitaux et l’harmonisation des normes du marché unique aideront les entreprises des nouvelles technologies propres à se développer et à être compétitives. Cela soutiendra plus largement la compétitivité industrielle de l’Europe. La véritable clé du succès réside dans la résorption du déficit d’investissement climat. L’UE devra pour cela apporter rapidement les financements nécessaires. Elle est en mesure de le faire dès demain, sans même attendre le prochain cycle budgétaire de l’UE. Elle pourrait lancer un plan d’investissement dans les technologies propres qui s’appuierait sur le Fonds pour l’Innovation, la Banque européenne d’investissement et les reliquats de l’enveloppe du fonds de relance.
L’avertissement de M. Draghi est clair : le status quo ne suffira pas. L’Union européenne dispose déjà des outils nécessaires pour mener à bien l’opération requise, il s’agit maintenant de les utiliser avec précision, et de toute urgence.