Investir en faveur du climat contribuera à la sortie de crise

1 avril 2020 - Étude Climat - Par : Hadrien HAINAUT / Dr. Quentin PERRIER / Benoît LEGUET / Maxime LEDEZ

Face à la crise sanitaire du covid-19, de nombreux États à travers le monde adoptent d’importants programmes de soutien économique. C’est notamment le cas en France. Convaincu que l’action pour le climat, au-delà de la phase d’urgence sanitaire, peut contribuer à soutenir l’activité économique en sortie de crise tout en renforçant la résilience de notre société, I4CE propose dans cette étude un plan de financement public de 7 milliards d’euros par an associé à une trentaine de mesures. Ce plan permet de déclencher annuellement 19 milliards d’euros d’investissements publics et privés favorables au climat.

 

Conjuguer urgence sanitaire, sauvegarde économique et sortie de crise est possible

Au plus fort de l’urgence sanitaire, la priorité est au ralentissement de l’épidémie, à la continuité des services essentiels au fonctionnement de notre société et à la mobilisation massive du système de santé. Durant cette période, la sauvegarde économique des activités immobilisées passe par la prise en charge du chômage partiel et le soutien à la trésorerie des entreprises. Au-delà de cette phase de « réanimation économique », une stratégie de sortie de crise devra être déployée en mobilisant les leviers de l’action publique, en particulier la capacité d’investissement public et la fiscalité.

 

Notre conviction est que l’action climatique n’est pas une entrave à la sortie de crise, mais une réponse efficace à la demande de résilience qui émergera, selon toute vraisemblance, dans les sociétés européennes. C’est pourquoi il faut privilégier des leviers qui offrent des bénéfices combinés dans trois domaines :

 

  1. L’environnement : en gardant une crédibilité dans le Green Deal, en préservant le capital industriel des filières bas-carbone, en adaptant notre économie aux dérèglements climatiques ;
  2. L’économie : en contribuant à la relance de l’activité à court terme et en réduisant la sensibilité à des crises futures : chocs de prix du pétrole, approvisionnement alimentaire et industriel ;
  3. La santé : en réduisant nos fragilités face à des menaces sanitaires, notamment par l’amélioration de la qualité de l’air et la réduction de la précarité énergétique.

 

Garder le cap sur les objectifs de la Stratégie nationale bas-carbone

Même au regard du choc économique majeur qui se profile, la Stratégie nationale bas-carbone reste un point de repère essentiel dans la mobilisation de l’économie en faveur du climat. Cette stratégie, élaborée par le gouvernement après consultation des parties prenantes et révisée l’an dernier, décrit comment la France entend, pour chaque secteur, réduire ses émissions de gaz à effet de serre (GES).

 

Nous considérons sept secteurs particulièrement importants car ils regroupent les deux tiers des investissements bas-carbone du pays : (1) la rénovation des logements privés, (2) la rénovation des bâtiments tertiaires (publics et privés), (3) le déploiement des voitures bas-carbone, (4) les infrastructures de transport en commun, (5) les infrastructures ferroviaires, (6) les aménagements cyclables, et (7) la production d’électricité renouvelable.

 

Pour chaque secteur, nous évaluons les objectifs d’investissement exprimés dans la Stratégie nationale bas-carbone, et nous proposons des mesures adaptées pour les atteindre, assorties d’un plan de financement évaluant les contributions des pouvoirs publics, des entreprises, des ménages et des institutions financières.

 

Fournir une impulsion publique de 7 milliards d’euros par an, pour déclencher 19 milliards d’euros d’investissement annuel

 

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Si on agrège l’ensemble de ces secteurs, le plan de financement repose sur une impulsion publique de 7 milliards d’euros par an jusqu’à 2023, déclenchant 19 milliards d’euros d’investissements annuels en faveur du climat.

 

  • L’État consacrerait 4,3 milliards d’euros par an de plus au soutien des investissements favorables au climat, dont 1,3 milliard d’euros pour la rémunération des producteurs d’électricité renouvelable et 3,3 milliards d’euros pour le cofinancement des ménages, entreprises et collectivités qui entreprennent de nouveaux investissements.
  • Les collectivités augmenteraient leurs investissements et cofinancements de 2,1 milliards d’euros par an. La totalité de cette augmentation pourrait être financée par des instruments spécifiques aux projets, comme des subventions, des certificats d’économies d’énergie (CEE) ou des emprunts auprès des banques publiques et commerciales.
  • Les banques publiques diffuseraient 2,3 milliards d’euros par an d’engagements nouveaux, à destination des entreprises, des collectivités et des sociétés de projet.

 

En complément de cette action publique, les fournisseurs d’énergie, les entreprises publiques gestionnaires d’infrastructures (comme la RATP et SNCF Réseau) ou les banques commerciales augmenteraient leurs financements favorables au climat sous forme d’investissements ou de prêt aux entreprises et aux ménages.

Pour aller plus loin
  • 10/12/2024 Tribune
    Budget et climat : les douze travaux des pouvoirs publics

    Le changement climatique n’a pas disparu avec la motion de censure. La dynamique d’investissement en faveur du climat, amorcée par le public et le privé, doit se poursuivre pour assurer notre sécurité énergétique et la résilience de notre modèle agricole. Pour Benoît Leguet, il faut prendre les bonnes décisions dès la future loi de finances 2025. La « réalité [budgétaire] ne disparaîtra pas par l’enchantement d’une motion de censure », prévenait Michel Barnier juste avant la chute de son gouvernement. Il aurait pu ajouter « les réalités du changement climatique et de la transition écologique non plus ».

  • 19/07/2024
    Top départ pour la nouvelle législature

    Ni la campagne législative ni ses résultats n’auront permis de clarifier l’avenir de la planification écologique et d’arbitrer un chemin à suivre. Les enquêtes prouvent que l’opinion soutient très largement la finalité de l’action climatique mais les clivages s’accentuent sur les voies et moyens. La vision caricaturale d’une « écologie punitive » ne fera que prospérer tant que le débat sur le partage de l’effort n’est pas résolu dans une perspective d’équité et d’adhésion large des Français. Dans le contexte institutionnel que nous connaissons, la suite dépendra beaucoup des initiatives des parlementaires. 
    Dans cette dernière newsletter avant la trêve estivale, à l’heure où la nouvelle Assemblée se réunit pour la première fois, [i4ce] vous propose de faire le point sur les prochains sujets que les parlementaires auront à traiter et de relire nos dernières études associées. 

  • 18/07/2024 Billet d'analyse
    Le défi de l’investissement climat derrière le plan de prospérité européen

    Le programme de compétitivité d’Ursula Von der Leyen fait la une des journaux, mais le dur labeur de la mise en œuvre et de des investissements pour le climat ne fait que commencer. Dans le billet ci-joint (en anglais), Ciaran Humphreys et Dorthe Nielsen décrivent les défis que pose cette phase de mise en œuvre et comment aligner l’ambition climatique sur la vision économique de la présidente.

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