Édition 2022 du Panorama des financements climat
Avec la crise énergétique et le bouclier tarifaire, la France paie au prix fort une dépendance aux énergies fossiles entretenue par un manque chronique d’investissements dans la décarbonation de l’économie. Cette édition du Panorama dresse un état des lieux détaillé de ces dépenses cruciales entreprises par les ménages, les entreprises et les pouvoirs publics, dans la rénovation des logements, les achats de véhicules électriques, les énergies renouvelables, ou encore les infrastructures du train, des transports en commun et du vélo. De façon encourageante, les investissements climat ont fortement progressé l’an dernier, portés, entre autres facteurs, par des réglementations favorables et par les soutiens publics du plan de relance. Mais leur sursaut reste fragile, et l’analyse de plusieurs scénarios de transition montre qu’il faut encore accroître les investissements climat pour garder le cap sur la neutralité carbone et réduire durablement la dépendance aux énergies fossiles.
Un sursaut encore fragile des investissements climat
Après avoir résisté à la crise sanitaire, les investissements climat des ménages, des entreprises et des administrations publiques augmentent fortement et atteignent 84 milliards d’euros en 2021, soit 18 milliards de plus qu’en 2020. Ils progressent dans la plupart des secteurs, notamment dans les véhicules électriques et hybrides, les énergies renouvelables, ou encore dans la rénovation énergétique des bâtiments. Ce sursaut s’explique par le décalage des projets retardés en 2020, mais aussi par la réglementation, surtout dans l’automobile, et par les soutiens publics accrus, notamment grâce au plan de relance.
Toutefois, le niveau atteint en 2021 reste fragile. Face à des matériaux plus chers, au manque de main d’œuvre et d’expertise, les ménages, les entreprises et les collectivités ont de plus en plus de mal à entreprendre et à financer leurs projets d’investissements climat. Et les prix exceptionnellement élevés des énergies les privent soudainement d’une partie de leurs capacités de financement.
Il faut encore investir davantage pour garder le cap sur les objectifs climat
Malgré leur croissance notable, les investissements climat restent insuffisants. À partir des scénarios « Transition(s) 2050 » de l’ADEME, nous avons estimé les investissements climat supplémentaires qu’il faudrait réaliser dans les bâtiments, les transports et la production d’énergie pour s’engager sur le chemin de la neutralité carbone. Ils se situent entre 14 milliards d’euros par an pour une transition frugale, et jusqu’à 30 milliards d’euros par an dans un scénario où les progrès techniques préservent les modes de vie. Des montants minimums, qui ne couvrent pas les besoins dans l’agriculture, l’industrie ou encore l’adaptation au changement climatique.
Le gouvernement révise en ce moment sa stratégie climat et devra trancher parmi ces scénarios de transition. Mais quel que soit le scénario retenu, il impliquera d’investir plus dans les équipements et les infrastructures bas-carbone, notamment pour atteindre le nouvel objectif européen de réduire les émissions nettes de gaz à effet de serre de 55 % d’ici 2030 par rapport à leur niveau de 1990. Et tandis que les financements du plan de relance se terminent à la fin de l’année, les pouvoirs publics doivent programmer des moyens dans la durée pour continuer à accompagner les ménages et les entreprises. C’est notamment l’enjeu des débats budgétaires de l’automne, puis de la loi de programmation énergie-climat (LPEC), prévue d’ici l’été 2023.
Les investissements fossiles décrochent, mais peuvent encore rebondir
Les investissements fossiles ont fortement diminué depuis la crise sanitaire, et s’élèvent à 62 milliards d’euros en 2021. Ce décrochage s’explique principalement par le recul des immatriculations des véhicules thermiques, provoqué par les difficultés d’approvisionnement en semi-conducteurs mais aussi par des réglementations plus exigeantes sur les émissions des véhicules. Pour atteindre les objectifs nationaux, les investissements fossiles doivent encore être divisés par deux d’ici 2030.
Cependant, les investissements fossiles peuvent encore rebondir. Si les difficultés d’approvisionnement finissent par se résoudre, davantage de véhicules thermiques pourraient être immatriculés. Et si la crise énergétique se prolonge, elle pourrait amener de nouveaux investissements dans l’importation de gaz ou dans les centrales thermiques. Pour éviter ce rebond et réduire durablement la dépendance aux énergies fossiles, il faut sans attendre accélérer les investissements climat.
Dans cette courte vidéo de deux minutes, Maxime Ledez d’I4CE vous résume ce qu’il faut retenir de l’édition 2022 du Panorama des financements climat, de l’évolution des investissements climat et fossiles ainsi que des besoins de la France pour atteindre la neutralité carbone :
Par rapport à la version mise en ligne en octobre 2022, le rapport comprend des corrections des erreurs de totaux dans le chapitre dédié aux besoins d’investissement. Ces corrections ne remettent pas en question les principaux messages du rapport.