Pourra-t-on faire rouler les trains à la prochaine canicule ?

22 juillet 2022 - Tribune - Par : Dr. Vivian DEPOUES

Les perturbations dans les transports lors des vagues de chaleur interrogent : la situation s’aggravera-t-elle si ces épisodes se multiplient ? Pour l’éviter, il faut investir dans un équipement public certifié «adapté au changement climatique».

 

Alerte canicule, perturbation possible sur votre train. Prévoyez de l’eau en cas de besoin.» Pour certains usagers, ce SMS de la SNCF n’aura été qu’un avertissement sans conséquence. D’autres, utilisateurs, comme ceux du Thalys Paris-Amsterdam mercredi dernier, du métro (la RATP ayant décidé de ralentissements préventifs au plus fort de la canicule), de bus ou même de téléphériques urbains à Toulouse ou à Brest au mois de juin ont ressenti beaucoup plus concrètement la sensibilité des systèmes de transport aux fortes chaleurs au cours des dernières semaines. Trajets suffocants, trafic perturbé, circulations annulées ont été le lot de très nombreux voyageurs. Au-delà de l’inconfort de chacun, ces événements ont aussi des conséquences importantes sur le fonctionnement de l’économie.

 

 

Prioriser les investissements

Pendant longtemps, les conditions climatiques n’étaient pas vraiment une question quand on parlait de transports : les lignes à grande vitesse, les rames de TER ou les voies de tramway pouvaient être conçues pour un climat donné, quel qu’il soit, et on oubliait le sujet. Quelques crises pouvaient survenir, mais elles étaient exceptionnelles et on passait vite à autre chose. Dans un contexte de changement climatique, c’est-à-dire dans un monde dans lequel l’exceptionnel d’hier devient la norme, l’expérience passée devient obsolète, et la variabilité des conditions plus grande, les choses sont beaucoup moins simples. Alors, que faire ?

 

Il faut d’abord prendre conscience que des transports «adaptés» sont avant tout des transports en bon état. Rattraper les retards de maintenance devient encore plus critique alors que les infrastructures existantes sont plus régulièrement mises à l’épreuve des éléments. Cela nécessite d’abord de bien connaître les vulnérabilités et probablement de prioriser les investissements, quitte à renoncer à certains nouveaux développements pour se concentrer sur la modernisation de l’existant. Certains acteurs, comme la région Sud, ont initié des démarches pour établir leur stratégie en la matière mais le chemin à parcourir reste long.
Doter les gestionnaires d’infrastructures et leurs autorités régulatrices des moyens de connaître leurs vulnérabilités et de piloter l’adaptation, comme c’est déjà le cas au Royaume-Uni, ne coûtera pas des milliards : nous estimons qu’ils auront besoin de l’ordre de 15 millions d’euros par an.

 

 

Faire des choix fonctionnels

Des milliards, par contre, c’est ce que l’on investit déjà dans les infrastructures de transport, sans savoir si elles seront adaptées : 13 milliards par an aujourd’hui et probablement plus à l’avenir (le Conseil d’orientation des infrastructures estime le besoin à 22 milliards d’euros par an)…

 

 

Lire l’article sur Libération

Contacts I4CE
Dr. Vivian DEPOUES
Dr. Vivian DEPOUES
Chercheur senior – Adaptation au changement climatique Email
Pour aller plus loin
  • 21/06/2024
    En attendant le Plan national d’adaptation au changement climatique

    Les élections législatives anticipées ont balayé la dernière chance pour le gouvernement de présenter le projet de 3ème Plan National d’Adaptation au Changement Climatique (PNACC3) avant l’été. Les travaux avaient néanmoins bien avancé et, quelles que soient les suites, il y aura trois choses à retenir des progrès des derniers mois sur l’adaptation. La première, c’est l’idée maitresse du PNACC3 – celle qui pourrait structurellement changer la donne en matière d’adaptation et autour de laquelle toutes les dynamiques ont commencé à s’aligner : le partage d’une trajectoire de réchauffement de référence (TRACC). La prise en compte systématique du climat futur selon les hypothèses partagées de cette TRACC est une manière efficace pour enfin arrêter de regarder dans le rétroviseur et concrétiser un « réflexe adaptation » dans tous les investissements structurants. À ce stade, la TRACC n’est encore inscrite dans le marbre nulle part. Aller au bout de cette idée nécessitera un nouveau moment politique sur l’adaptation.

  • 20/06/2024
    Vagues de chaleur : ce que l’on peut dire des coûts de l’adaptation des bâtiments

    Face aux conséquences grandissantes des vagues de chaleur sur les activités économiques et les populations, l’adaptation du secteur du bâtiment apparait désormais comme un nouvel impératif. Si la question du « comment » a déjà fait l’objet de nombreux travaux, la question du « combien » reste pour le moment peu traitée. Pour avancer en ce sens, nous présentons dans ce rapport : un premier état des lieux de ce que l’on sait dire à date des coûts de l’adaptation aux vagues de chaleur pour le secteur du bâtiment ; la méthodologie que nous avons utilisée pour chiffrer les surcoûts de l’adaptation aux vagues de chaleur, construite à partir des éléments disponibles et de discussions avec des experts.

  • 05/04/2024
    Quels coûts de l’adaptation ? Anticiper les effets d’un réchauffement de +4°C

    Combien va coûter l’adaptation d’une France à +4°C ? La réponse à cette question émergente est essentielle pour piloter l’action publique et comme le soulignait la Cour des Comptes dans son rapport public annuel en mars « pour mesurer, […] l’impact qu’aura globalement l’adaptation au changement climatique sur les finances publiques ». Pourtant les magistrats soulignent aussi que l’« évaluation précise des coûts actuels et futurs de l’adaptation, […] est encore trop souvent lacunaire, voire inexistante ». Ce constat est particulièrement préoccupant à quelques semaines de la présentation du prochain Plan National d’Adaptation (PNACC3).

Voir toutes les publications
Contact Presse Amélie FRITZ Responsable communication et relations presse Email
Inscrivez-vous à notre liste de diffusion :
Je m'inscris !
Inscrivez-vous à notre newsletter
Une fois par semaine, recevez toute l’information de l’économie pour le climat.
Je m'inscris !
Fermer