Comprendre le Sommet des Nations Unies sur l’action pour le climat en une minute
En amont du Sommet Climat, Alice Pauthier d’I4CE présentent les principaux enjeux du Sommet et autres événements qui auront lieu à New York : au-delà du relèvement de l’ambition, la finance sera à l’ordre du jour. Elle sera à New York avec Ian Cochran pour présenter le dernier rapport de l’I4CE sur l’Alignement, un sujet dont tout le monde parle… sans partager une compréhension commune de ce que c’est et de ce que cela implique.
Le 23 septembre 2019, Antonio Guterres, Secrétaire général des Nations Unies, convoque à New York un « Sommet Action Climat« . Il ne s’agit pas simplement d’une autre session de négociations entre diplomates :
- D’une part, un grand nombre de présidents, premiers ministres et autres chefs d’État du monde entier seront présents. Et les attentes sont élevées : le Secrétaire général de l’ONU a appelé les chefs de gouvernement à annoncer comment ils vont accroître leur ambition et rapidement accélérer l’action pour la mise en œuvre de l’Accord de Paris.
- D’autre part, la New York Climate Week annuelle qui se déroulera en parallèle présentera les derniers progrès réalisés par les entreprises, le secteur financier et les ONG en matière d’action climatique et d’alignement avec les objectifs de l’Accord de Paris. La question sera alors : est-ce que les acteurs publics et privés passent suffisamment rapidement de l’engagement à l’action dans la lutte contre ce qui est de plus en plus considéré comme une « urgence climatique » ?
Deux priorités pour le Sommet : accroître l’ambition nationale et les engagements en faveur d’un changement transformationnel
Revenons en 2015 : l’Accord de Paris et l’Agenda du Développement Durable viennent d’être approuvés. Chacun de ces deux textes place au cœur de l’action pour le climat et le développement durable les pays et leurs trajectoires nationales pour parvenir à un « développement résilient au climat à faibles émissions de gaz à effet de serre (GES) ». Il est demandé aux pays de définir des stratégies à long terme et des plans d’action à court terme (Contributions Déterminées au niveau National, CDN) à réviser « à la hausse » tous les cinq ans. Ce nouveau processus centré sur les pays leur donne la possibilité de définir leur contribution aux objectifs internationaux en fonction de leur contexte et de leurs capacités.
Aujourd’hui, des progrès ont été réalisés et le processus est de plus en plus suivi par les pays. A ce jour, 184 pays Parties ont élaboré la première série de plans d’action à court terme et un nombre plus limité de pays a défini des stratégies à long terme. Cependant, le verdict est clair : ces documents, lorsqu’ils sont disponibles ne fournissent pas d’orientations stratégiques claires aux acteurs économiques. Peut-être plus important encore, la CCNUCC et le GIEC ont tous deux estimé que leur ambition est loin d’être suffisante pour atteindre les objectifs de l’Accord.
En amont de ce Sommet, António Guterres, le Secrétaire général de l’ONU a demandé aux gouvernements de présenter des plans concrets et réalistes en matière de changement climatique et de réviser à la hausse leurs CDN pour réduire les émissions de gaz à effet de serre de 45% au cours de la prochaine décennie, et parvenir à l’objectif de net zéro émissions d’ici 2050. La révision de ces plans est très attendue car cela pourrait envoyer des signaux forts – positifs ou négatifs – à tous les acteurs économiques quant aux évolutions des économies et sociétés nationales. L’espoir étant que lors du prochain cycle de soumission des CDN en 2020, celles-ci soient plus proches de ce qui est nécessaire pour atténuer rapidement le changement climatique et s’y adapter.
En outre, depuis 2015, on s’accorde de plus en plus à dire que les objectifs climatiques à long terme ne peuvent être atteints par un développement qui suivrait une trajectoire « business as usual ». Lors du Sommet, neuf axes ont été définis et présenteront des coalitions et actions permettant de soutenir un « changement transformationnel » nécessaire dans les domaines de la transition énergétique, des infrastructures, des villes et de l’action locale, de la transition industrielle, de la résilience et de l’adaptation, des solutions fondées sur la nature, de la finance climatique et du prix du carbone. L’enjeu principal est que ces axes de travail donnent lieu à des engagements, avec une forte implication des gouvernements au plus haut niveau, en vue de mettre en place les incitations économiques et cadres d’investissement nécessaires pour soutenir la transformation des économies et des sociétés. A mesure que les travaux du réseau des banques centrales (NGFS) progressent la réglementation financière fait partie des sujets à suivre attentivement alors que de plus en plus d’études démontrent que des progrès supplémentaires sont nécessaires, même dans les pays les plus actifs.
Décrypter les discussions sur le climat et la finance : augmenter la finance climat d’une part et « aligner » tous les flux financiers avec les objectifs de l’Accord de Paris d’autre part.
Si la finance ne sera peut-être pas le principal sujet de discussion du Sommet de New York, les deux volets de l’Accord de Paris liés à la finance seront à l’agenda :
- Finance Climat : Premièrement, la France, la Jamaïque et le Qatar, avec l’appui de la Banque mondiale, dirigent le volet finance climat et prix du carbone du Sommet, qui s’attachera à répondre à l’engagement de mobiliser 100 milliards de dollars par an d’ici 2020 pour l’atténuation et l’adaptation dans les pays en développement. Alors que le Fonds vert pour le climat est sur le point d’être reconstitué pour la première fois, la finance climat figurera en bonne place à l’ordre du jour du Sommet – avec une attention particulière pour le soutien des pays développés aux pays en développement pour la mise en œuvre et/ou l’amélioration de leurs CDN.
- Alignement : Deuxièmement, New York sera une étape importante pour les discussions des praticiens sur l’« Alignement » avec l’Accord de Paris en marge du Sommet. L’article 2.1 c) de l’Accord de Paris a créé un mandat supplémentaire pour tous les pays Parties de rendre tous les flux financiers nationaux et internationaux compatibles avec une trajectoire « faiblement émettrice de GES et résiliente au changement climatique ». Depuis la COP21, un nombre croissant d’institutions financières publiques et privées se sont engagées à « s’aligner » avec l’Accord de Paris. Mais à ce jour, aucun cadre global n’a été proposé pour définir ce que cela signifie et implique en pratique. I4CE vient de publier un document de travail proposant un cadre qui peut être utilisé par les acteurs économiques et gouvernementaux – y compris les institutions financières – cherchant à aligner leurs stratégies et opérations avec l’Accord de Paris. Dans le cadre du projet conjoint soutenu par l’International Development Finance Club (IDFC) et la Fondation européenne pour le climat (ECF), Climate Policy Initiative (CPI) a publié une première application du cadre I4CE aux institutions financières de développement.
Lors du Sommet, I4CE, en tant que Secrétariat de l’Initiative Climate Action in Financial Institutions, organise conjointement avec l’IDFC et le Groupe des Banques multilatérales de développement un atelier d’experts sur l’Alignement. Cet événement fait partie d’une série d’ateliers qui a débuté lors de la COP24 à Katowice et qui a été suivie par des sessions de discussions en juin 2019 à Bonn réunissant des experts, des praticiens du secteur financier et d’autres parties prenantes pour échanger sur les recherches et approches émergentes à ce jour sur ce sujet. L’atelier de New York vise à favoriser les échanges sur le corpus croissant de recherches, d’expertise et d’approches sur l’alignement avec les objectifs de l’Accord de Paris et, plus largement, les Objectifs de Développement Durable (ODD).
Le Sommet sera l’occasion de faire le point et d’identifier les questions clés et les points de convergence et de divergence potentiels à mesure que les acteurs progressent dans leurs feuilles de route et leurs stratégies pour contribuer à la réalisation des objectifs de l’Accord de Paris. Et, espérons-le, cela nous aidera aussi à répondre à l’éternelle question : en faisons-nous collectivement assez ?